Thu Van Trans’ large-scale abstract frescoes as well as her paintings emit a harmonious yet powerful aura. They convey unity and at the same time suggest departure and expansion, growing both inwardly and outwardly. During my first conversation with the artist, who was preparing her exhibition at the MAMAC in Nice at the time, we talked about the very frescoes she was just starting and to which I’m referring. She explained the technique to me, in which pigments previously soaked in water are applied to fresh lime plaster. We also discussed that she would send me pictures of the process. So I received step-by-step photos of developing frescoes.
In art galleries, the attention is often placed on the final products, so curators see little of the creation of a work. This artistic journey is a delicate and intimate moment, characterized not by classical aesthetic norms or quantifiable dimensions, but by an elusive essence. Art, by its very nature, has a fragile and intimate quality that cannot be easily put into words. The magic lies in the abundance that surrounds us, yet insight into this distinctive creative process remains a rarity.
And so the work emerged, grew like a storm front from the carrier preparation, the wall, through white/grey contours to the first colors - first blue, green and yellow in the three frescoes, Les couleurs du gris (2023), with more later. The work grew in complexity, something that is harder and harder to describe. In the end, even if it sounds strange to say, we see a work made up of colorful, intense and powerful discharges of pigment. It is a work with a maelstrom, a thunderstorm or tempest from which one cannot escape. The view becomes blurred and something rears up, growing in size and height. It seems to be limited only by the edges of the work, as if it were captured in time, a snapshot.
Thu Van Tran’s frescoes reminded me of the work or rather of details in British artist William Turner’s paintings (1775-1851), who was already known for his landscape and seascapes during his lifetime. I’m also reminded of the story of how he had himself tied to the mast of a ship when a storm arose and the resulting paintings. But also of today’s reception of his works as a very early depiction of man-made pollution and air pollution. Thu Van Tran’s frescoes pick up on this intensity and topicality. They speak of chemical compositions, of warfare agents that were used in various wars and conflicts, particularly in the Vietnam War. These are components such as Agent Orange, Purple or Blue - military names for a chemical defoliant that the USA used extensively to defoliate forests and destroy crops. As a result, millions of people who came into contact with the pesticide died.
In her work with photography, sculpture, film and installation, Thu Van Tran merges her Vietnamese-French background into works that are critical in terms of aesthetics and content. Her focus is on the man-made changes in landscapes, the aggressive interventions in nature that not only create living space but also destroy it. An aesthetic component always plays a role here - not only externally through restraint, bright colors and fragility, but also in terms of content through an interest in the mystical side of nature and the poetic cruelty in the beauty of our environment.
This poetic cruelty is one of the strongest and recurring messages in her work. It is the abstraction and the focus on a seemingly minor issue that makes the artist’s work so sharp and precise. The whole develops further, in works such as “The Red Rubber” (2017), casts of trunks of the rubber tree or “In the Fall, In the Rise #1, #2 and #3” (2017) or photograms with traces of foliage, as well as in many others. Thu Van Tran takes on the work of a conservator. She traces nature and its man-made destruction, preserves and maintains what once was and, in doing so, stores the cruelty of the many realities in which she lives. Her works, be it the frescoes on site, the paintings, the photography or the sculptural works, are all different manifestations of memories, still images or time capsules that will survive.
Les grandes fresques abstraites et les peintures de Thu-Van Tran dégagent une aura à la fois harmonieuse et puissante. Elles expriment un sentiment d’unité tout en évoquant simultanément une rupture et une expansion – une croissance à la fois intérieure et extérieure. Lors de ma première conversation avec l’artiste, qui préparait alors son exposition au MAMAC de Nice, nous avons discuté des fresques qu’elle venait juste de commencer et auxquelles je fais référence ici. Elle m’a décrit sa technique, qui consiste à appliquer des pigments préalablement trempés dans l’eau sur un enduit frais à la chaux. Nous avons également décidé qu’elle m’enverrait des photos de ce processus. J’ai donc reçu, étape par étape, des photos des fresques en cours de réalisation.
Dans les centres d’art, l’accent est généralement mis sur le résultat final, de sorte que les commissaires d’exposition n’ont qu’un infime aperçu de la création d’une œuvre. Ce voyage artistique est un moment sensible et intime, qui ne répond pas à des normes esthétiques classiques ou à des dimensions quantifiables, mais est par essence insaisissable. L’art, par sa nature même, a un caractère fragile et intime qui ne peut pas être facilement exprimé par des mots. La magie réside dans la profusion qui nous entoure, mais il est rare, néanmoins, d’avoir un aperçu de ce processus créatif si particulier.
Ainsi les fresques sont-elles apparues. Elles se sont développées comme un front orageux à partir de la préparation du support (le mur), depuis le tracé des contours blanc-gris jusqu’aux premières couleurs : d’abord du bleu, du vert et du jaune dans les trois fresques intitulées Les Couleurs du gris(2023), auxquelles sont venues s’ajouter d’autres teintes. Les fresques ont gagné en complexité, ce qui les a rendues de plus en plus difficiles à décrire. Au final, même si cela peut sembler étrange à dire, nous sommes confrontés à une œuvre composée d’un déferlement de pigments colorés, intenses et puissants. Une œuvre en forme de maelström – un orage ou une tempête auquel on ne peut échapper. La vue devient floue et quelque chose jaillit et prend de l’ampleur. Une chose qui ne semble avoir pour limites que les contours de l’œuvre, comme un moment figé dans le temps, un instantané.
Les fresques de Thu-Van Tran m’évoquent les peintures, ou plutôt certains détails, de l’artiste britannique William Turner (1775-1851), qui était déjà célèbre en son temps pour ses paysages et ses marines. Elles me renvoient également à l’anecdote selon laquelle il se serait fait attacher au mât d’un navire pendant une tempête et aux toiles qui en ont résulté. Mais aussi à la perception actuelle de ses œuvres, considérées comme une représentation très en avance sur son temps de la pollution atmosphérique et de la pollution due à l’activité humaine. Les fresques de Thu-Van Tran relèvent de la même intensité et de la même actualité. Elles font référence à des agents chimiques, comme ceux qui ont été utilisés comme arme dans des guerres et conflits variés, en particulier pendant la guerre du Vietnam. Des composants tels que « l’agent orange », « l’agent violet » ou « l’agent bleu », noms donnés à des herbicides défoliants utilisés à grande échelle par l’armée américaine pour déforester d’immenses étendues boisées et détruire les terres agricoles. Il en a résulté la mort de millions de personnes.
Dans son travail avec la photographie, la sculpture, le film ou l’installation, Thu-Van Tran fait converger ses origines franco-vietnamiennes dans des œuvres qui ont une dimension critique en terme de forme comme de contenu. Elle met l’accent sur les changements introduits par l’activité humaine dans les paysages, les interventions agressives dans la nature qui ne créent pas seulement des surfaces habitables mais contribuent également à la détruire. Ses œuvres ont toujours une dimension esthétique, non seulement de par leur apparence extérieure, dont la sobriété et les couleurs vives font ressortir la beauté fragile, mais aussi en termes de contenu, qui témoigne d’un intérêt pour le côté mystérieux de la nature et la poésie cruelle qui s’exprime dans la beauté de notre environnement.
Cette poésie cruelle est l’un des messages récurrents de son œuvre et certainement l’un des plus puissants. C’est son caractère abstrait et la façon dont elle se focalise sur des questions apparemment mineures qui rendent la démarche de Thu-Van Tran si incisive et si précise. Elle poursuit la même approche dans des œuvres comme Le Caoutchouc rouge (2017), avec ses moulages en cire de troncs d’hévéas, ou Au couchant, au levant #1, #2 et #3 (2017) ; dans ses photogrammes de feuilles à l’aspect fantomatique ; et dans bien d’autres de ses créations. Thu-Van Tran assume avec son travail le rôle d’une protectrice de l’environnement. Elle explore la nature et les traces de sa destruction par l’homme, tente de préserver et de maintenir ce qui a été et, ce faisant, enregistre la cruauté des nombreuses réalités dans lesquelles elle vit. Ses œuvres, qu’il s’agisse de fresques in situ, de peintures, de photographies ou de sculptures, sont toutes des manifestations différentes de souvenirs, d’images fixes ou de capsules temporelles appelés à survivre.
Working with a wide range of materials subject to imprinting and transfer, from sculpture to painting to film, Thu Van Tran uses her outsider identity - a Vietnamese woman living in France - to explore the question of displacement - Vietnamese woman living in France - to explore the question of physical and cultural displacement. From her own perspective as a migrant, she probes the setbacks of globalisation of globalization, using material and language in the same movement. Her oscillate between power and beauty, suggesting a critical mobility of history: “Memory is our medium,” she asserts, “and we live in matter”.
Born in 1979 in Ho Chi Minh City (Vietnam), Thu Van Tran now lives and works in Paris. Her family moved to France when she was two. A graduate of the École nationale supérieure des beaux-arts de Paris in 2004, she also trained in art foundry with the Compagnons de Devoir in 2001 (Fonderie de Coubertin).
Thu Van Tran is the winner of the Rosa Schapire Art Award 2023 presented by the Hamburger Kunsthalle, Germany; the same year in France, she was named one of the 100 Femmes de Culture 2023. In 2018, she was nominated for the Prix Marcel Duchamp (France). She holds numerous solo exhibitions in France and abroad, including: Nous vivons dans l’éclat, MAMAC, Nice (France), 2023; Novel Without a Title, Kunsthaus Baselland, Basel (Switzerland), 2020; 24h à Hanoi, Le CREDAC - Centre d’art d’Ivry-sur-Seine, 2019 Hanoi, (Vietnam), 2019; A novel without a title, VCCA - Vincom Center for Contemporary Art,Hanoi, (Vietnam), 2018; Exchange of gifts, n.b.k. - Neuer Berliner Kunstverein, Berlin,(Germany), 2016.
Her work is also presented in prestigious institutions, such as: Avant l’orage l’orage, Pinault Collection - Bourse du Commerce, Paris, (France), 2023; Is it morning for you yet? at The 58th Carnegie International - Carnegie Museum of Art, Pittsburgh, (USA), 2022; Air, QAGOMA Queensland Art Gallery - Gallery of Modern Art, Brisbane, (Australia), 2022; A Century in Color, Bundeskunsthalle Bonn, (Germany), 2022; Reclaiming the Earth, Palais de Tokyo, Paris, (France), 2022; Faits du même bois, Musée National des Arts Asiatiques Guimet, Paris, (France), 2021 ; Global(e) Resistance, MNAM Centre Pompidou, Paris, (France), 2020 ; Words at an Exhibition - an exhibition in ten chapters and five poems, Busan Biennale, Museum of Contemporary Art Busan (MOCA), Busan, (Korea), 2020; Viva
Arte Viva, 57° International Exhibition of the Venice Biennale, L ’ Arsenal, Venice, (Italy), 2017; Jardin Infini. De Giverny à l’Amazonie, Centre Pompidou-Metz, ( France), 2017. Her work has been included in major public and private collections, including: Pinault Collection Paris, (France) ; Fondation Louis Vuitton, Paris, (France) ; MAC VAL, Vitry-sur-Seine, (France); FRAC Aquitaine, Bordeaux, (France); MNAM, Musée National d’Art Moderne - Centre George Pompidou, Paris, ( France) ; Fondation Kadist, (France/United States ) ; Lidice Memorial, Lidice, (Czech Republic) ; FRAC Midi-Pyrénées, Toulouse, (France) ; The Strauss Collection, San Diego, (United States) ; Vehbi Koc Foundation, Istanbul, (Turkey); FRAC Ile-de-France, (France); Musée Départemental d’Art Contemporain,
Rochechouart, (France); Louvre Abu-Dhabi, Abu Dhabi, (United Arab Emirates).
Thu Van Tran is represented by Almine Rech (Paris, London, New-York, Shanghai), Meessen De Clercq (Brussels) and Rüdiger Schöttle (Munich).
Travaillant à partir d’une gamme étendue de matériaux sujets à l’empreinte et au transfert,
de la sculpture à la peinture en passant par le film, Thu Van Tran use de son identité outsider
– femme vietnamienne vivant en France – pour explorer la question du déplacement
physique et culturel. À partir de son propre regard migrant, elle sonde les revers de la
globalisation en mettant au travail, dans un même mouvement, la matière et le langage. Ses
oeuvres qui oscillent entre des rapports de force et de beauté suggèrent une mobilité
critique de l’Histoire : « La mémoire est notre médium, affirme-t-elle, et nous vivons dans la
matière ».
Née en 1979 à Ho Chi Minh Ville (Vietnam), Thu Van Tran vit et travaille aujourd’hui à Paris.
Sa famille s’installe en France alors qu’elle a deux ans. Diplômée de l’École nationale
supérieure des beaux-arts de Paris en 2004, elle se forme également en fonderie d’art
auprès des Compagnons de Devoir en 2001 (Fonderie de Coubertin).
Thu Van Tran est lauréate du Rosa Schapire Art Award 2023 décerné par la Hamburger
Kunsthalle, (Allemagne) ; La même année en France, elle est distinguée parmi les 100
Femmes de Culture 2023. En 2018, elle est nommée pour le prix Marcel Duchamp (France).
Elle présente de nombreuses expositions personnelles en France et à l’étranger,
notamment : Nous vivons dans l’éclat, MAMAC, Nice (France), 2023 ; Novel Without a Title,
Kunsthaus Baselland, Bâle, (Suisse), 2020 ; 24h à Hanoi, Le CREDAC – Centre d’art d’Ivry-sur-
Seine, (France), 2019 ; A novel without a title, VCCA – Vincom Center for Contemporary Art,
Hanoï, (Vietnam), 2018 ; Échange de présents, n.b.k. – Neuer Berliner Kunstverein, Berlin,
(Allemagne), 2016.
Son travail est également présenté dans de prestigieuses institutions, telles que : Avant
l’orage, Pinault Collection – Bourse du Commerce, Paris, (France), 2023 ; Is it morning for
you yet?, The 58th Carnegie International – Carnegie Museum of Art, Pittsburgh, (États-Unis),
2022 ; Air, QAGOMA Queensland Art Gallery – Gallery of Modern Art, Brisbane, (Australie),
2022 ; A Century in Color, Bundeskunsthalle Bonn, (Allemagne), 2022 ; Réclamer la terre,
Palais de Tokyo, Paris, (France), 2022 ; Faits du même bois, Musée National des Arts
Asiatiques Guimet, Paris, (France), 2021 ; Global(e) Resistance, MNAM Centre Pompidou,
Paris, (France), 2020 ; Words at an Exhibition – an exhibition in ten chapters and five poems,
Busan Biennale, Museum of Contemporary Art Busan (MOCA), Busan, (Corée), 2020 ; Viva
Arte Viva, 57° exposition internationale de la biennale de Venise, L ’ Arsenal, Venise, (Italie),
2017 ; Jardin Infini. De Giverny à l’Amazonie, Centre Pompidou-Metz, ( France), 2017.
Ses oeuvres ont intégré d’importantes collections publiques et privées, notamment : Pinault
Collection Paris, (France) ; Fondation Louis Vuitton, Paris, (France) ; MAC VAL, Vitry-sur-
Seine, (France) ; FRAC Aquitaine, Bordeaux, (France) ; MNAM, Musée National d’Art
Moderne - Centre George Pompidou, Paris, ( France) ; Fondation Kadist, (France/ États-
Unis) ; Lidice Memorial, Lidice, (République tchèque) ; FRAC Midi-Pyrénées, Toulouse,
(France) ; The Strauss Collection, San Diego, (États-Unis) ; Vehbi Koc Foundation, Istanbul,
(Turquie) ; FRAC Ile-de-France, (France) ; Musée Départemental d’Art Contemporain,
Rochechouart, (France) ; Louvre Abu-Dhabi, Abu Dhabi, (Émirats-Arabes-Unis).
Thu Van Tran est représentée par les galeries Almine Rech (Paris, Londres, New-York,
Shanghai), Meessen De Clercq (Bruxelles) et Rüdiger Schöttle (Munich).
Fabian Schöneich is the founder and director of CCA Berlin – Center for Contemporary Arts. He was the curator of Portikus in Frankfurt (2014–18) and worked as an assistant curator at Kunsthalle Basel and Kunstinstituut Melly (formerly known as Witte de With Center for Contemporary Art) in Rotterdam.
Fabian Schöneich est fondateur et directeur du CCA Berlin - Center for Contemporary Arts. Il a été commissaire d’exposition de Portikus à Francfort (2014-18) et a travaillé comme commissaire d’exposition adjoint à la Kunsthalle de Bâle et au Kunstinstituut Melly (anciennement connu sous le nom de Witte de With Center for Contemporary Art) à Rotterdam.
Marie Maillard builds on existing forms and patterns, she doubts perception and questions reality, finds the play between presence and absence intriguing and is looking for contemporary ways to produce and disperse art. Furthermore, Marie Maillard carefully keeps track of which new materials. In her visual work she also reflects on the nature of matter and the materials of the future.nthe artist preludes on future technology that makes material transformations possible by, for example, making changes to the molecular structure. In this way, marble, wood, stone or metal could become transparent or even liquid and the branch could transform into inorganic matter such as glass or water (‘TWIG 1808‘, 2018).