The exhibition Fluid Desires at art institute Nest in the Hague, the Netherlands, ended on March 22. Of the eight participating artists, five were French. That’s no coincidence. As a Dutch liaison in Paris, I like to create connections between France and the Netherlands. Two countries that are geographically practically neighbors but at the same time, culturally and linguistically, worlds apart. They seem to be each others blind spot whereas the exchange can be, and has proven, to be so fruitful.
I started the research for Fluid Desires in 2013 when I was still living in the Netherlands and continued it in France. At the time it struck me that many artists used liquids. This intrigued me and I was wondering what motivated them. While researching I discovered a wider and more interesting field of art that deals with fluidity without necessarily using liquids, among them some of my favourite French artists: Hicham Berrada, Mimosa Echard, Marie Maillard, Shanta Rao and Jérôme Robbe (apart from Inge van Genuchten, Maya Rochat and Leonid Tsvetkov). I had been following their work for years. None of them had explored Dutch territory before. Now that the exhibition has just happened, visitors were glad to discover them and shared my enthusiasm.
Fluid Desires was an exhibition about the current liquid world. Concepts that have been carved in stone for decades are shifting. Think for example of time, space, reality, nature, object and the object-human relationship. Developments in science, technology and philosophy are the catalyst for these changes. An important place occupies the Polish-British sociologist and philosopher Zygmunt Bauman who has extensively analysed the increasingly slippery society. The hybrid, unstable world serves as a point of departure for the artists in Fluid Desires. Post-apocalyptic cocktails and other works of art with a liquid allure zoom in on blurring boundaries between natural and synthetic, living and non-living. Their understanding of the world is through matter. The artworks do not use symbols or metaphors, nor do they depict anything; on the contrary, they just are. These explosions of color, texture, and slipperiness, are related in aesthetics. Throughout the exhibition, the concept of contagion is recurrent. Contamination as a marker for meanings that mix, images that merge and ideas that influence each other. The exhibition has sometimes science-fiction-like traits as platitudes are deserted and the future is fantasized.
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Hicham Berrada is an alchemical artist who conjures up enticing worlds. The influence of science (chemistry, physics, biology and computer science) is undeniable in his work. He occupies a unique position. Berrada’s artworks imitate, sublimate or sabotage natural processes such as growth, bloom and decay, and metabolism.
I was immediately struck when I saw his work for the first time in La Panacée (Montpellier, 2017). He showed Tranche, Présage (2013-2017) that I would later also select for Fluid Desires. In aquariums the artist composes underwater landscapes using alkalines, acids, water, minerals and elements such as copper, cobalt or iron. These landscapes slowly continue to develop. It is striking that lifeless substances reveal that they possess movement and behave in a manner evoking living beings. This is Hicham Berrada at his best. The ecosystems that the artist brings into being shake up the distinctions between living and mineral, between organic and inorganic. Even though the lead, silver, aluminum and other elements the artist uses in his work are naturally occurring, these substances are actually poisonous, especially in high concentrations and in limited space. In a time of foreboding that nature will ultimately cease to exist, these evolving, chemical landscapes open the door to other forms of life, movement and beauty.
Berrada is also intrigued by the concepts of morphogenesis and creation. Morphogenesis, literally the ‘beginning of the shape’, is the biological process that causes an organism to develop its shape. For Berrada morphogenesis is first and foremost the idea of not being interested in a fixed form or finished sculpture, but rather in the idea of a shape in motion. He reveals in his works invisible physical phenomena with evocative forces and captures energies inhabiting this world that we normally do not see. Perhaps that’s what strikes me most about this artist. Hicham Berrada considers himself as a ‘director of energy‘, a servant of nature that helps to fulfil certain processes. Not one shape is created by himself, he merely helps certain forms appear at a given moment in a given place. For instance, in the video Céleste (2014) that I saw in his solo in Louvre Lens (2019) and I subsequently selected for Fluid Desires, it is the wind that paints the clouds. I have come to know Hicham Berrada as a modest and intelligent artist working hard in his studio, being in contact with scientists and not at all caring about what is fashionable but following his own path.
Nanda Janssen, 2020
L’exposition Fluid Desires présentée à la galerie Nest à La Haye, aux Pays-Bas, s’est terminée le 22 mars. Parmi les huit artistes participants, cinq étaient français. Ce n’est pas un hasard. En tant que néerlandaise chargée de mission à Paris, j’aime créer des liens entre la France et les Pays-Bas. Deux pays presque voisins, mais des mondes à part du point de vue culturel et linguistique. Ils semblent être la zone grise l’un de l’autre alors que l’échange peut être, et s’est avéré, si fructueux.
J’ai commencé les recherches pour Fluid Desires en 2013 alors que je vivais encore aux Pays-Bas et je les ai poursuivies en France. À l’époque, j’ai été frappé par le fait que de nombreux artistes utilisaient des liquides. Cela m’intriguait et je me demandais ce qui les motivait. Au cours de mes investigations, j’ai découvert un domaine de l’art plus large et passionnant qui s’intéresse à la fluidité sans nécessairement utiliser de liquides, et où officient certains de mes artistes français préférés : Hicham Berrada, Mimosa Echard, Marie Maillard, Shanta Rao et Jérôme Robbe (sans oublier Inge van Genuchten, Maya Rochat et Leonid Tsvetkov). Je suivais leur travail depuis des années. Aucun d’entre eux n’avait exploré le territoire néerlandais auparavant. Lors de l’exposition, les visiteurs ont été enchantés de les découvrir et ont partagé mon enthousiasme.
Fluid Desires était une exposition consacrée au monde liquide actuel. Des concepts gravés dans la pierre depuis des décennies sont en train de changer. Pensez par exemple au temps, à l’espace, à la réalité, à la nature, à l’objet et à la relation objet-homme. L’évolution de la science, de la technologie et de la philosophie est le catalyseur de ces changements. Une place importante de la recherche dans ce domaine revient au sociologue et philosophe polono-britannique Zygmunt Bauman, qui a analysé en détail une société de plus en plus instable. Le monde hybride et fluctuant sert de point de départ aux artistes de Fluid Desires. Les cocktails post-apocalyptiques et autres Å“uvres d’art à l’apparence liquide mettent en lumière les frontières floues entre le naturel et le synthétique, le vivant et le non-vivant. Les artistes appréhendent le monde à travers le prisme de la matière. Les Å“uvres d’art n’utilisent ni symboles ni métaphores, et ne dépeignent rien ; elles sont, tout simplement. Ces explosions de couleurs, de textures et l’instabilité qu’elles suggèrent sont liées à l’esthétique. Le concept de contagion est récurrent tout au long de l’exposition. La contagion agit comme marqueur de significations qui se mélangent, d’images qui fusionnent et d’idées qui s’influencent mutuellement. L’exposition prend parfois des allures de science-fiction, car elle se départit des lieux communs et fantasme l’avenir.
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Artiste alchimiste, Hicham Berrada crée des univers séduisants. L’influence de la science (chimie, physique, biologie et informatique) est indéniable dans son Å“uvre. Il occupe une position unique. Les Å“uvres de l’artiste imitent, subliment ou sabotent des processus naturels tels que la croissance, la floraison et la décomposition, et le métabolisme.
Son travail m’a immédiatement interpelée lorsque je l’ai découvert à La Panacée (Montpellier, 2017). Il a exposé Présage, Tranche (2013-2017) que j’ai sélectionné plus tard pour Fluid Desires. Dans des aquariums, l’artiste compose des paysages sous-marins à l’aide d’alcalins, d’acides, d’eau, de minéraux et d’éléments tels que le cuivre, le cobalt ou le fer. Ces paysages se développent lentement et il est frappant de constater que des substances sans vie sont dotées d’un mouvement et se comportent d’une manière qui évoque les êtres vivants. C’est à travers ces créations qu’Hicham Berrada exprime le mieux son talent. Les écosystèmes que l’artiste fait naître bousculent les distinctions entre vivant et minéral, entre organique et inorganique. Bien que le plomb, l’argent, l’aluminium et d’autres éléments que l’artiste utilise dans ses Å“uvres soient d’origine naturelle, ces métaux sont en réalité des poisons, en particulier à forte concentration et dans un espace limité. À une époque où l’on craint que la nature cesse d’exister, ces paysages chimiques en évolution ouvrent la porte à d’autres formes de vie, de mouvement et de beauté.
Hicham Berrada s’intéresse également aux concepts de morphogenèse et de création. La morphogenèse, littéralement « génération de la forme », est le processus biologique qui permet à un organisme de développer sa forme. Pour Berrada, la morphogenèse suppose avant tout de laisser de côté les formes stables ou les sculptures achevées, mais de s’intéresser plutôt à des formes en mouvement. Dans ses Å“uvres, il révèle des phénomènes physiques indiscernables aux forces évocatrices et capte des énergies qui habitent notre monde et nous sont d’habitude invisibles. C’est peut-être cela qui me frappe le plus chez cet artiste. Hicham Berrada se considère comme un « metteur en scène d’énergie, un serviteur de la nature qui aide à réaliser certains processus ». Il ne crée lui-même aucune forme, il permet simplement à certaines d’apparaître à un moment donné dans un lieu donné. Par exemple, dans la vidéo Céleste (2014) que j »ai découverte lors de son exposition individuelle au Louvre-Lens (2019) et que j’ai ensuite sélectionnée pour Fluid Desires, c’est le vent qui peint les nuages. J’ai appris à connaître Hicham Berrada que je définirais comme un artiste modeste et intelligent qui travaille dur dans son atelier, en contact avec des scientifiques et qui, loin de se soucier des modes, suit son propre chemin.
Nanda Janssen, 2020
Traduit de l’anglais par Elsa Maggion
The work of Hicham Berrada combines intuition and knowledge, science and poetry. In his works, he explores scientific protocols that imitate different natural processes and/or climatic conditions; “I try to master the phenomena that I mobilize as a painter masters his pigments and brushes. masters his pigments and brushes. My brushes and pigments would be the hot, cold, magnetism, light “.
Born in 1986 in Casablanca, Morocco, Hicham Berrada lives and works in Paris and Roubaix, France.
His work has been presented in numerous solo and group exhibitions: at the Louvre-Lens, at the Hayward Gallery in Gallery in London; at the Bernard A. Zuckerman Museum of Art in Kennesaw (United States); at the Punta della Dogana - Pinault Collection, Venice, Italy; Musée Zadkine, Paris, France; Martin-Gropius-Bau, Berlin, Germany; at the Centre Pompidou, Paris; at the Palais de Tokyo, Paris; at Abbaye de Maubuisson; in the gardens of the Château de Versailles; at the Mac Val, Vitry-sur-Seine ; at the macLyon ; at the Fresnoy- Studio national des contemporary arts, Tourcoing ; at the ZKM, Karlsruhe (Germany) ; at the Frankfurter Kunstverein, Frankfurt am Main; MoMA PS1, New York York; ICAS-Institute of Contemporary Arts, Singapore; Moderna Museet, Stockholm and the Banco de la República, Bogota.
He has taken part in several biennials: Yokohama Triennial, Taipei Biennial, Riga Biennial Biennial of Riga, Biennial of Lyon; BIM-Biennale of the Image in Movement, Geneva and Yinchuan Biennale (China). The artist has also realized several performances: at the Villa Medici and the Maxxi, Rome; at the Abattoirs, Toulouse ; at the Mac Val ; as well as during the Nuits Blanches of Paris, Brussels and Melbourne. He has done several residencies, notably at the Villa Medici in Rome and at the Pinault Collection in Lens.
Le travail de Hicham Berrada associe intuition et connaissance, science et poésie. Il explore dans ses oeuvres des protocoles scientifiques qui imitent au plus près différents processus naturels et/ou conditions climatiques. « J’essaye de maîtriser les phénomènes que je mobilise comme un peintre maîtrise ses pigments et pinceaux. Mes pinceaux et pigments seraient le chaud, le froid, le magnétisme, la lumière ».
Né en 1986 à Casablanca au Maroc, Hicham Berrada vit et travaille à Paris et Roubaix.
Son travail a été présenté dans le cadre de nombreuses expositions personnelles et collectives : au Louvre-Lens, à la Hayward Gallery à Londres ; au Bernard A. Zuckerman Museum of Art à Kennesaw (États-Unis) ; à la Punta della Dogana - Collection Pinault, Venise, Italie ; au Musée Zadkine, Paris ; au Martin-Gropius-Bau, Berlin ; au Centre Pompidou ; au Palais de Tokyo, Paris ; à l’Abbaye de Maubuisson ; dans les jardins du Château de Versailles ; au Mac Val, Vitry-sur-Seine ; au macLyon ; au Fresnoy– Studio national des arts contemporains, Tourcoing ; au ZKM, Karlsruhe (Allemagne) ; au Frankfurter Kunstverein, Francfort-sur-le-Main ; au MoMA PS1, New York ; à l’ICAS–Institute of Contemporary Arts, Singapour ; au Moderna Museet, Stockholm et à la Banco de la República, Bogota. Il a pris part à plusieurs biennales : Triennale de Yokohama, Biennale de Taipei, Biennale de Riga, Biennale de Lyon ; BIM–Biennale de l’Image en Mouvement, Genève et Biennale de Yinchuan (Chine). L’artiste a également réalisé plusieurs performances : à la Villa Médicis et au Maxxi, Rome ; aux Abattoirs, Toulouse ; au Mac Val ; ainsi que lors des Nuits Blanches de Paris, Bruxelles et Melbourne. Il a effectué plusieurs résidences, notamment à la Villa Médicis à Rome et à la Pinault Collection à Lens.
Being an art historian, Nanda Janssen works as an independent curator and art critic. She is also Councellor of visual arts for the Embassy of the Netherlands in France since 2018. She considers herself as a Dutch liaison in Paris. Since 2007 she has specialized in the Paris and French contemporary art circuit. After two residencies of a year at La Cité Internationale des Arts, the last of which ended in 2017, she decided to stay in Paris. She publishes amongst others in the Dutch art magazines Museumtijdschrift, Metropolis M, See All This and the Belgian magazine Hart. Nanda Janssen curated the exhibitions Fluid Desires (Nest, The Hague, 2020), Eva Nielsen (Selma Feriani Gallery, Tunis, 2017), Bruno Peinado (21rozendaal, Enschede) and Carried-Away - Procession in Art (Museum Arnhem). Furthermore, she proposed the Ceija Stojka exhibition from La Maison Rouge in Paris to the Dutch museum Het Valkhof and subsequently assisted the French curators (2019). In addition, she will be on the committee ‘mécénat’ of La Fondation des Artistes (2022-2023). She was one of the jury members of the Royal Award for Dutch Painting (2014-2019), initiated by HM King Willem-Alexander, and committee member visual arts of the Dutch Council for Culture (2015-2017), the legal adviser of the government in the fields of the arts, culture and media.
Historienne de l’art, Nanda Janssen travaille en tant que commissaire d’exposition et critique d’art indépendante. Conseillère en arts visuels pour l’ambassade des Pays-Bas en France depuis 2018, elle se considère comme une liaison néerlandaise à Paris. Depuis 2007, elle est spécialisée dans le circuit de l’art contemporain parisien et français. Après deux résidences d’un an à La Cité Internationale des Arts, dont la dernière s’est terminée en 2017, elle s’installe à Paris. Elle publie entre autres dans les magazines d’art néerlandais Museumtijdschrift, Metropolis M, See All This et le magazine belge Hart. Elle a été commissaire des expositions Fluid Desires (Nest, La Haye, 2020), Eva Nielsen (Galerie Selma Feriani, Tunis, 2017), Bruno Peinado (21rozendaal, Enschede) et Carried-Away - Procession in Art (Museum Arnhem). En outre, elle a proposé l’exposition Ceija Stojka de La Maison Rouge à Paris au musée néerlandais Het Valkhof et a ensuite assisté les commissaires français (2019). Elle fera partie du comité “mécénat” de la Fondation des Artistes (2022-2023). Nanda Janssen a été l’un des membres du jury du Prix royal de la peinture néerlandaise (2014-2019), initié par SM le Roi Willem-Alexander, et membre du comité des arts visuels du Conseil néerlandais pour la culture (2015-2017), le conseiller juridique du gouvernement dans les domaines des arts, de la culture et des médias.
For almost 20 years, I have developed a practice of painting that has gradually opened up to very diverse fields, from performance to monumental sculpture, from painting on silk to installation. Using various bases and developing reuse, assemblages and formal confrontations, I wish to show how the modern project resists in the body and materiality of its own representations. As the result of an intense activity as an iconographer, my work is based on an open practice of the form, quite the opposite of a nostalgic or referential re-reading, enabling the free exercise of the most unexpected visual combinations. The idea is for me to materialise images, literally making them concrete. Started in 1998, mainly through the practice of painting, my work gradually has become more characteristic, more specifically in recent years, with a large variety of means in play.