After eighteen months of a global pandemic and a summer of devastating wildfires and floods around the world, “survivalists”—people who’ve been preparing for the collapse of our industrial civilisation—no longer come across as lunatics.
In Outremonde (“Out of this world”), ThĂ©o Mercier’s recent exhibition at Collection Lambert in Avignon, such a community was seen meandering in a space of post-apocalyptic desolation. The show featured a child, two men and two women under the bright lights of the art foundation’s galleries. They wore anachronistic garments, almost medieval-looking: men in suede boots, cotton knickerbockers and felt jackets, women in linen tunics. The artist discloses that The Inner Scar— Philippe Garrel’s 1972 feature-length movie in which the singer Nico wanders in the wide and empty landscapes of New Mexico and the Egyptian deserts—is a crucial reference. In Avignon, Outremonde emanates the same feeling of solitude: Mercier places his audience as if we’re looking at the last survivors of a cataclysm that swept away the human species.
The performers wander through a succession of galleries as they walk around large sculptures made of sand. One of them, a Gothic window, is collapsing—or rather crumbling—into the heap of sand it is placed on. Its upper part retains its pointed arch and ornaments but, on closer examination, the window has been bricked up. Two troubling matte black spheres are placed nearby. They offer a sharp contrast to the beige sand structures. In a contiguous room, a gigantic foot, 2 meters high and 2.5 long, is a focal point that resembles an archaeological relic with a fragile fate. A dog—also in sand—watches it nearby.
Théo Mercier enjoys unlikely combinations of materials. While looking through his collection of works, one finds car rims and tires made in white onyx, oil cans in lapis-lazuli instead of their usual plastic, and fake aquarium stones in synthetic resin. But above all, Mercier is an image-maker. He plays on these contrasts to stage surrealist worlds and directs our journey among sculptures and performers. This holistic approach and his taste for disconcerting images surely comes from the time he spent working in Matthew Barney’s studio in New York, when the American artist was preparing River of Fundament (2014), a 5.5-hour operatic movie of visceral and mystical reincarnations.
In an adjoining room, a man hangs by his feet. He seems to be meditating while playing with sand that slips through his fingers. The young boy joins him and, silently, starts a slow dance on the floor. Time passes. The world beyond the walls that surround them doesn’t matter anymore.
Charles Aubin, 2021
Après dix-huit mois de pandémie mondiale du Covid-19 et un été 2021 aux feux ravageurs et inondations dévastatrices aux quatre coins du globe, les groupes « survivalistes », ces femmes et hommes qui se préparent pour l’effondrement de notre civilisation industrielle, paraissent de moins en moins insensés.
Outremonde, la récente exposition de Théo Mercier à la collection Lambert à Avignon donnait à voir une telle communauté, abasourdie, déambulant dans un espace de désolation post-apocalyptique. Sous une lumière blanche chirurgicale, l’artiste a placé dans différentes galeries un enfant, deux hommes et deux femmes. Ils et elles portent des costumes anachroniques, presque médiévaux : bottes de daim, culottes de coton et veston de feutre pour les hommes, tuniques de lin pour les femmes. L’artiste cite comme référence La cicatrice intérieure, le film de 1972 de Philippe Garrel dans lequel la chanteuse Nico ère dans les paysages désolés du Nouveau Mexique et des déserts d’Égypte. À Avignon, Outremonde dégage un sentiment similaire de solitude : Théo Mercier place son public comme face aux derniers survivants d’un cataclysme qui aurait emporté l’espèce humaine.
Le groupe évolue dans une enfilade de galeries autour de larges sculptures de sable. L’une d’elles est une fenêtre gothique qui s’affaisse – ou plutôt se dissout – dans l’amas meuble de sable sur lequel elle repose. Sur sa partie supérieure, elle retient sa forme en ogive et ses ornementations mais à y regarder de plus près, son ouverture est murée. A proximité sont disposée deux sphères au noir mat inquiétant qui tranchent avec le beige des constructions de sable. Dans une salle contiguë, un gigantesque pied, de 2 mètres de haut et 2,5 de long, trône comme une relique archéologique au destin fragile. Face à lui, un chien de sable veille.
Théo Mercier se délecte des associations inattendues entre objets et matériaux. En parcourant son corpus d’œuvres, on peut trouver des pneus et jantes de voiture composés d’onyx blanc, des bidons d’huile, habituellement en plastique, chez lui en lapis-lazuli, ou encore des fausses pierres d’aquarium en résine synthétique. Mais avant tout, Théo Mercier est un faiseur d’images. Il joue de contrastes pour former des mondes surréalistes dont il met en scène les circulations entre sculptures, performeurs et public. Cette approche holistique et son goût pour les images déroutantes viennent sûrement de son temps passé à travailler dans le studio de l’artiste américain Matthew Barney à New York, quand celui-ci préparait River of Fundament (2014), un film opératique de cinq heures et demie, aux successions de réincarnations autant viscérales que mystiques.
Dans une salle adjacente, un homme pend par les pieds. Il semble méditer tout en manipulant du sable qui file entre ses doigts. Le jeune garçon le rejoint et, en silence, entame une danse au sol. Le temps passe, s’échappe. Le monde au-delà des murs qui les entourent ne compte plus.
Charles Aubin, 2021
Born in Paris in 1984, ThĂ©o Mercier is a sculptor and stage director. He lives and works between Paris and Mexico City. Resident of the Villa Medicis in 2013 and nominated for the Marcel-Duchamp Prize in 2014, Mercier has presented solo shows at the Lambert Foundation in Avignon, Museo El Eco (Mexico), MusĂ©e de la Chasse et de la Nature in Paris, [mac] Museum of Contemporary Art in Marseille, Lieu Unique in Nantes and Tri Postal in Lille (France). His work has been featured in numerous group shows at the Centre Pompidou, MusĂ©e du Quai Branly in Paris, Hamburger Banhof in Berlin, Biennial La Habana XIII in Cuba or Palacio Bellas Artes in Mexico, among others. Shifting from a “white cube” to a “black box” practice, Mercier has directed Du futur faisons table rase (2014), Radio Vinci Park (2016), La Fille du collectionneur (2017), Affordable Solution for Better Living (2018) for which he receives the Silver Lion of the Venice Biennial of Dance in 2019, as well as BIG SISTERS (2019) and Outremonde (2020), a site-specific performing environment made out of sand. He is currently working on the Chapter 2 taking place in 2022 both at the Conciergie de Paris and the Villette in Paris, as part of the Festival d’Automne. His performances have been presented at Festival d’Avignon, Nanterre-Amandiers, Menagerie de verre in Paris, Usine C in Montreal, The Invisible Dog Art Center in New York, Actoral Festival in Marseille, Dampfezentrale in Bern (Germany), Vooroit Art Center in Ghent (Belgium), or Vidy in Lausanne (Switzerland).
Né à Paris en 1984, Théo Mercier est un sculpteur et metteur en scène, il partage sa vie entre Paris et Mexico. Pensionnaire de la Villa Médicis en 2013 et nominé pour le prix Marcel-Duchamp en 2014, Théo Mercier a bénéficié d’expositions personnelles à la Collection Lambert à Avignon, au Museo El Eco à Mexico, au Musée de la Chasse et de la Nature à Paris, au [mac] Musée d’art contemporain à Marseille, au Lieu Unique à Nantes et au Tri Postal à Lille.
Son travail a été présenté dans de nombreuses expositions collectives au Musée du Quai Branly et au Centre Pompidou à Paris, au Hamburger Banhof à Berlin, à la Biennale de La Havane (Cuba) ou au Palacio Bellas Artes à Mexico.
Passant d’une pratique du « white cube » Ă celle de la « boite noire », ThĂ©o Mercier a mis en scène Du futur faisons table rase (2014), Radio Vinci Park (co-Ă©crit avec François Chaignaud, 2016), La Fille du collectionneur (2017), Affordable Solution for Better Living (co-Ă©crit avec Steven Michel, 2018) pour lequel ils reçoivent le Lion d’Argent de la Biennale de Venise 2019, BIG SISTERS (co-Ă©crit avec Steven Michel, 2020) et OUTREMONDE, un projet de « paysage vivant » autour de l’enfance et de l’imaginaire du sable crĂ©Ă© en 2021 Ă la Collection Lambert en Avignon dans le cadre du Festival d’Avignon. Ses performances ont Ă©tĂ© montrĂ©es Ă Nanterre-Amandiers, la MĂ©nagerie de verre Ă Paris, Ă l’Usine C Ă MontrĂ©al, The Invisible dog Art Center Ă New York.
Charles Aubin is Senior Curator and Head of Publications at Performa in New York, where since 2013 he has organized performances and programs featuring a wide range of artists, architects, choreographers, and filmmakers, including Nairy Baghramian, Jérôme Bel, François Dallegret, Maria Hassabi, Tarik Kiswanson, Malcolm Le Grice, Paul Maheke, Jimmy Robert, and Cally Spooner. Between 2015 and 2018 he also served as curator at Lafayette Anticipations in Paris. In 2019, Aubin coedited Bodybuilding, the first publication to survey the use of live performance by architects. His writing has appeared in Artforum, Critique d’art, Frieze, Kaleidoscope, and Mousse.
Charles Aubin est Senior Curator & Head of Publications à Performa (New York), où, depuis 2013, il a développé et présenté expositions, performances et programmes publics par un large panel d’artistes, architectes et chorégraphes dont Nairy Baghramian, Jérôme Bel, Maria Hassabi, Andrés Jaque, Tarik Kiswanson, Malcolm Le Grice et Jimmy Robert. Il est coéditeur de Bodybuilding, Architecture and Performance (Performa, 2019), le premier ouvrage à proposer une étude de l’utilisation de la performance par les architectes. Charles Aubin écrit régulièrement pour Artforum, Critique d’art, Frieze, Kaleidoscope et Mousse.
Une dĂ©claration frappante de JĂ©rĂ´me Robbe est la suivante : « La peinture n’a rien Ă voir avec le gĂ©nie, mais tout avec les inventions. Le gĂ©nie rĂ©side dans l’invention de matĂ©riaux et de techniques qui permettent de peindre diffĂ©remment.”